Le message de #MeToo

Un changement de culture s’impose dans le milieu de travail et à l’extérieur

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Depuis quelques mois, nous avons été témoins d’un changement extraordinaire de la perception et de la compréhension du public face à l’agression et au harcèlement sexuels. Initialement inspirées par les multiples allégations portées contre le cinéaste Harvey Weinstein, qui ont fait surface en octobre 2017, les femmes de partout dans le monde se sont mises à utiliser le mot-clic des médias sociaux #MeToo (#MoiAussi) pour décrire leurs propres expériences de harcèlement et d’agression sexuels dans leur lieu de travail et dans leurs communautés. Il est rapidement devenu apparent et inquiétant que des millions de femmes partageaient non seulement des expériences semblables d’attention sexuelle non désirée et importune de la part des hommes, mais aussi un sens de frustration commun quant à l’absence de recours efficace dont elles pourraient se prévaloir auprès de leurs employeurs ou d’un système judiciaire qui, au lieu de se concentrer à juger les victimes d’agression sexuelle, comme il semble le faire le plus souvent, jugerait plutôt les agresseurs.

Dans les semaines qui ont suivi, une liste grandissante d’hommes prestigieux, des acteurs et d’autres personnes de l’industrie cinématographique, des personnalités bien connues des médias, des journalistes et politiciens réputés, ont perdu leurs postes de pouvoir à la suite de révélations sur leur comportement envers les femmes. Le mouvement a même ébranlé la scène politique ici, en Ontario, et pourrait jouer un rôle important dans les résultats de l’élection provinciale en juin suite à la démission soudaine de Patrick Brown, chef du Parti conservateur, en raison d’allégations dirigées contre lui.

En quelques mois seulement, le phénomène Me Too en est arrivé à être considéré par plusieurs comme un tournant et un virage à 180 degrés dans la dynamique du pouvoir entre les hommes et les femmes, et ce, particulièrement dans le milieu de travail. Cependant, il est important de se rappeler que, contrairement aux vedettes de cinéma et aux autres femmes qui portent des accusations contre des hommes occupant des postes d’importance, plusieurs femmes, qui ont été victimes de harcèlement ou d’agression sexuels dans leur milieu de travail, ne se sentent toujours pas en mesure d’agir. Nonobstant les protections législatives minimes contre le harcèlement sexuel, les femmes qui travaillent, surtout celles qui ne sont pas protégé par un syndicat, craignent de graves conséquences si elles dénoncent.

Il est également important de se rappeler que, même si tout ceci semble s’être produit si soudainement, ce n’est guère un cas de justice rapide. Les comportements qui ont finalement été exposés se produisent depuis des années, voire même des décennies. Dans la mesure où Me Too est une victoire pour les femmes, c’est une victoire durement acquise et attendue depuis longtemps, une victoire contre laquelle ont conspiré la majorité des structures du pouvoir de notre société.

Le mouvement syndical œuvre depuis longtemps à promouvoir et à se battre pour l’égalité des sexes et, depuis presque 100 ans, OSSTF/FEESO est aux premières lignes de cette lutte. Lors de la deuxième assemblée générale de la Fédération en 1920, une résolution a été adoptée appuyant le principe « à travail égal, salaire égal » et pendant les décennies qui ont suivi, nous avons continué de nous concentrer sur les droits des femmes. Tout récemment, notre Comité provincial sur le statut de la femme a développé la ressource « Parcours vers le leadership » (Pathways to Leadership) qui encourage et guide les femmes qui souhaitent jouer un rôle plus actif au sein de la Fédération, tant au niveau local que provincial.

Depuis plusieurs années, nous avons porté une attention particulière au problème du harcèlement sexuel. Au début des années 90, OSSTF/FEESO a lancé « On a fini de rire » (The Joke is Over), une ressource méticuleusement recherchée pour aider les éducatrices et éducateurs à aborder le harcèlement sexuel dans nos écoles. En 2010, nous donnions suite avec « On ne s’amuse toujours pas » (Still Not Laughing), une ressource mise à jour avec un atelier connexe offert par notre Secteur des services éducatifs.

Il est important pour nous de célébrer le travail accompli sur l’égalité entre les genres ainsi que nos efforts ciblés contre le harcèlement sexuel. Bien que Me Too nous démontre que des victoires importantes sont possibles, il a aussi servi d’illustration dramatique de l’ampleur du problème et de rappel que les comportements inacceptables de la part des hommes envers les femmes sont toujours monnaie courante dans plusieurs milieux et relations de travail. Nous lutterons toujours pour de meilleures protections et politiques ainsi que pour des processus améliorés qui dissipent la crainte de représailles pour les femmes qui dénoncent. Mais espérons aussi que Me Too deviendra un déclencheur qui encouragera les hommes à faire un examen honnête de leurs attitudes et de leurs comportements envers les femmes avec lesquelles ils travaillent et socialisent. Les politiques, les procédures et les autres protections formelles, aussi bien conçues qu’elles le soient, restent toujours des réponses après coup. Un changement de culture, autant à l’intérieur qu’à l’extérieur de nos milieux de travail, serait une bien meilleure solution.

About Harvey Bischof
Harvey Bischof est le 66e président provincial d’OSSTF/FEESO. Il a été élu pour la première fois à l’Exécutif provincial en 2007 au poste d’agent de l’Exécutif puis comme vice-président en 2011, 2013 et 2015. Il a été élu président en 2017 et réélu en 2019.

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